PEUT-ON
LIMITER LES RISQUES LIÉS AUX MARCHÉS FINANCIERS ? Traditionnellement,
les Institutions financières internationales, comme le Fonds Monétaire
International (FMI) ou la Banque mondiale, interviennent lorsque
la situation est critique ; de son côté, Alan GREENSPAN, Président de
la Réserve fédérale, fait des effets d'annonce et stigmatise l'optimisme
de la bourse américaine et l'"exubérance irrationnelle des marchés".
Cet interventionnisme, fort peu libéral et peu apprécié des financiers,
montre la volonté des Autorités politiques d'éviter les bulles spéculatives. En
fait, le rôle de ces Instances n'est pas d'organiser les marchés financiers.
C'est plutôt celui du Comité de Bâle, qui rassemble les Gouverneurs de
Banques centrales des principaux pays européens, d'Amérique du nord et du
Japon. Au
niveau européen, on a décidé, depuis l'Acte unique(1993), et dans une optique
purement monétariste, que l'organisation du système financier ne devait plus
être du ressort des États nationaux, mais d'Autorités monétaires indépendantes,
seule garantie d'une orthodoxie monétaire totale. Parmi
les autres mesures qui, force est de le constater, n'empêchent pas les évolutions
préoccupantes de se poursuivre, on peut citer les ratios de solvabilité
(eux-aussi destinés à limiter le montant des engagements bancaires), le système
d'appel de marge des marchés à terme (dépôts de garantie qui augmentent
quand les cours baissent en deçà d'une certaine proportion), les dispositifs
coupe-circuits qui suspendent la cotation d'un titre lorsqu'il dépasse un
certain seuil... Une
autre mesure a été proposée par James TOBIN, prix Nobel 1981) ; elle
consiste à mettre "un peu de sable dans les rouages", en taxant
faiblement (0,5 %) les mouvements de fonds purement spéculatifs, sur les
marchés dérivés en devises. Évidemment, pour connaître le succès, il
faudrait que cette taxe soit levée par tous les pays, sans exception, ce qui
semble bien peu réaliste. Pour A. MINC, même si ce prélèvement existait, il
ne freinerait en rien le mouvement des capitaux. Les taux d’intérêt
augmenteraient du montant de la taxe et elle serait donc acquittée par
l’ensemble des débiteurs mondiaux, y compris par les pays pauvres, et non par
les seuls spéculateurs (Le Monde 18/08/2001). Enfin, il convient de se pencher sur le contrôle des conglomérats financiers. Les activités bancaires ne connaissent pas de frontières, et le contrôle par les Banques centrales ne peut être organisé que sur une base nationale. C'est une difficulté essentielle, et, devant l'incapacité des États à contrôler les flux de capitaux et à sanctionner des entités multinationales, il est à craindre qu'en l'absence de contre-pouvoirs politiques, il faille faire confiance en ce que A. BERLE appelait dans la première moitié du XXème siècle la "conscience du Roi", c'est-à-dire la moralité des opérateurs eux-mêmes. Plus récemment, les rapports de 1995 et 1999 du P-DG de la Société générale, Marc VIENOT, préconisent la limitation du nombre de mandats d'administrateurs, la séparation des fonctions de président et de directeur général, une certaine publicité de la rémunération des dirigeants et la nomination d'un tiers d'administrateurs indépendants. Les trois premières propositions seront reprises dans la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE), votée en mai 2001. Cette loi NRE facilite également la participation des représentants des salariés aux organes de contrôle de gestion de l'entreprise et insiste sur sa "responsabilité sociale". L'ampleur des affaires récentes justifie enfin l'harmonisation internationale indispensable des normes et systèmes comptables, le renforcement du code de déontologie des analystes financiers et l'exigence de transparence des activités d'audit, des agences de notation et des concepteurs d'indices boursiers.
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