Une autre mondialisation
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UNE AUTRE MONDIALISATION ?

Le deuxième forum social mondial qui s ‘est tenu début 2002 à Porto Alegre a rassemblé des mouvements sociaux internationaux d’origines très diverses : syndicales, paysannes, écologistes, de solidarité Nord-Sud… Un point commun de ces organisations non gouvernementales (ONG) est la contestation de la mondialisation libérale et la promotion des valeurs démocratiques au niveau international.

Quels sont ces organismes qui fédèrent les réseaux de mobilisation citoyenne ? S’agit-il d’une émergence nouvelle ? Peut-on dégager des thèmes communs de mobilisation malgré la très grande variété des intérêts représentés ? Au-delà du succès médiatique certain, quel impact ont ces organisations sur la régulation capitaliste et la mondialisation des économies nationales ? Sont-elles véritablement des organisations anti-mondialistes ?

Les ONG ont réussi à accréditer l’idée de leur capacité à constituer un contre-pouvoir aux États les plus puissants et aux firmes multinationales qui prônent la libéralisation totale de l’économie mondiale. Elles proposent un projet alternatif au libéralisme et offrent une réponse aux aspirations croissante des citoyens qui souhaitent une mondialisation plus maîtrisée. Mais leur légitimité à représenter une « société civile internationale » est très contestée. Pour A. MINC, ces « vestales de la modernité » (Le Monde 17/08/2001) comme Greenpeace ou Amnesty International, gagneront leur légitimité quand elles s’appliqueront à elles-mêmes les principes de transparence et de gouvernance qu’elles exigent des autres détenteurs de pouvoir, en matière par exemple de choix des dirigeants, de ressources financières et de responsabilité démocratique.

UN PATCHWORK D’ORGANISATIONS ET DE PERSONNALITÉS

Les innombrables organisations qui contestent les excès du capitalisme libéral forment une nébuleuse hétérogène de syndicats, de réseaux tiers-mondistes ou religieux, d’écologistes, d’intellectuels. On y trouve des leaders charismatiques d’inspirations très diverses comme Ulrich BECK, sociologue allemand, inspirateur des Verts, Pierre BOURDIEU, un des cofondateurs d’ATTAC (Association pour la taxation des opérations financières et pour l’aide au citoyen), Toni NEGRI, philosophe marxiste italien, le commandant MARCOS, leader de la guérilla zapatiste au Chiapas, qui fut un des premiers à formuler un discours anti-mondialisation, José BOVÉ porte-parole de la Confédération paysanne qui exploite le thème de la « mal bouffe », Vandana SCHIVA, militante écologiste indienne qui combat l’agro-industrie, Michael MOORE, écrivain et cinéaste américain qui combat les grands patrons par le rire, Jeremy RIFKIN, essayiste américain, opposant farouche aux OGM, Ralph NADER, candidat à la dernière élection présidentielle américaine, grand défendeur des consommateurs, de l’environnement et de la démocratie depuis quarante ans.

On trouve aussi des économistes comme Joseph STIGLITZ, ex-chef économiste de la banque mondiale, prix Nobel d’économie 2001, qui critique fortement les institutions financières internationales, Liem HOANG-NGOC, un des économistes français d’ATTAC qui fustigent la mondialisation.  

LES GRANDS THÈMES DE MOBILISATION

Même si les militants anti-mondialistes sont souvent critiqués pour leur absence de proposition concrète, on peut tenter de regrouper leurs revendications autour de cinq grands thèmes mobilisateurs :

1- la critique des dérives des multinationales : actions contre leurs conditions de travail, l’emploi de mineurs, les faibles salaires dans certains pays, l’absence de droits sociaux (Corp Watch, Global Exchange aux USA), contre l’exploitation des sous-traitants, contre la consommation à outrance et les dépenses de publicité (les Ad Busters aux USA), pour les médicaments génériques, (Traetment Action Compaign en Afrique du sud),

2 - une autre régulation de la finance mondiale : action contre la spéculation, les crises, les krachs, les paradis fiscaux, la dictature des marchés, les licenciements, les délocalisations et pour la taxe TOBIN (ATTAC en France),

3 - le respect de l’environnement et des ressources naturelles: actions pour un développement durable et une réduction des émissions de gaz à effet de serre pour tous les pays, y compris les pays riches et les États-Unis (Worldwatch Institut aux USA),

4 - la promotion d’une agriculture propre et autosuffisante : actions pour la « souveraineté alimentaire » et la critique du libre échange, promotion des techniques traditionnelles et des projets alternatifs, lutte contre les OGM (Greenpeace, Via Campesina…),

5 - le harcèlement de certaines Institutions internationales : annuler la dette des pays pauvres (Drop the Debt et les catholiques de Jubilee 2000) et consacrer, comme le souhaite l’ONU, 0,7 % du PNB des pays riches à l’aide publique au développement, actions contre l’OMC, accusée de promouvoir hors de tout contrôle, une libéralisation des échanges qui ne profitent qu’aux pays riches (Global Trade Watch), actions contre le FMI et la Banque mondiale, émanations des États-Unis, qui conditionnent leur aide à des réformes pénibles pour les pays en difficulté, avec privatisations, austérité budgétaire, libéralisation des marchés financiers (Third World Network, Global Exchange, Focus on the Global South, ATTAC).