L'entreprise peut-elle être un vecteur de développement durable ?
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Thème de réflexion :

L’entreprise peut-elle être vecteur de développement durable ? (CAPET Économie - gestion 2004)

 

        Ce sujet est très transversal. Il relève à la fois de l'économie générale et de l'économie d'entreprise. Il est inspiré d'un article de M. Villette, paru dans Le Monde du 1er avril 2003. On s'accorde généralement sur le fait que les choix collectifs des dix prochaines années en terme de protection de l'environnement (limitation des émissions de gaz à effet de serre, de la déforestation, du gaspillage et de la pollution de l'eau...) et de lutte contre la pauvreté détermineront de manière irréversible les conditions futures de croissance économique et de développement au niveau mondial.

Or, l'entreprise produit (des biens et des services mais parfois des externalités négatives), répartit des richesses et influence le comportement des consommateurs (J. K. Galbraith) et des autres agents économiques. Par conséquent, toute politique de développement passe par elle.

Définition des termes du sujet

  • Le développement durable . Le rapport Brundtland (1987) [42ème session de l'ONU] intitulé "our common future" définit le "substenable development" (traduit en français par soutenable puis durable) comme "un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion, le concept de "besoins" et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient de donner la plus grande priorité, et l'idée des limitations que l'état de nos techniques et de notre organisation sociale imposent sur la capacité de l'environnement à répondre aux besoins actuels et à venir".

Pour être durable, le développement doit être viable écologiquement (sans effets négatifs sur l'environnement ou qui impose la réparation des pollutions actuelles et anciennes), viable économiquement (qui assure la solvabilité en permanence des agents économiques et qui fait correspondre le niveau de bien être à celui souhaité) et équitable pour la société (lutte contre la pauvreté).

  • L'entreprise. Du point de vue économique, l'entreprise est à la fois une unité de production (au sens large) et de répartition de la richesse créée. D'autres approches sont possibles (sociales, organisationnelle), mais elles doivent être en rapport avec le sujet.

Par ses choix, l'entreprise peut favoriser le développement durable de nos sociétés ou au contraire l'entraver. A priori, la recherche prioritaire de la performance économique la conduit à économiser ses ressources rares (énergétiques par exemple) mais n'exclut pas le recours à des ressources non renouvelables (pétrole, minerais, uranium...) préjudiciable au développement économique futur, ni la production d'externalités négatives (pollution). En outre, les choix de répartition de la richesse créée ont une incidence majeure en terme d'inégalité sociale. De même, par la culture qu'elle met en œuvre, elle peut sensibiliser ses membres, ainsi que les cibles de sa communication externe, aux valeurs de la société.

  • L'entreprise, vecteur de développement durable. Deux axes de réflexion : d'une part, le développement durable passe par l'entreprise qui répond aux incitations ou aux exigences de son environnement et des pouvoirs publics en particulier. D'autre part, l'entreprise peut être actrice du développement durable si celui-ci fait partie de sa propre stratégie de développement.

Des problématiques possibles

  • Du point de vue de l'économie de l'entreprise on peut se demander quelles sont les missions de l'entreprise et ses rapports avec son environnement au sens économique du terme ?

Le développement durable est en effet à la fois source de contraintes et d'opportunités. Source de contrainte car l'entreprise doit respecter des normes de plus en plus strictes visant la protection de l'environnement, à la fois au niveau des produits et services rendus, mais aussi au niveau des processus de production eux-mêmes. Cette adaptation est coûteuse pour l'entreprise.

Le développement durable est également source d'opportunités comme en témoigne le fort taux de croissance des marchés de dépollution par exemple. Ainsi, l'entreprise peut passivement répondre aux exigences des pouvoirs publics (instances nationales et internationales) ou bien être actrice du développement durable. Dans le second cas, celui-ci fait partie de sa stratégie commerciale et de communication : il s'agit de répondre à une exigence d'une partie des consommateurs qui souhaitent acquérir des biens et des services respectueux de l'environnement.

Cependant, le risque d'instrumentalisation est fort : certaines grandes entreprises adoptent un comportement opportuniste, notamment des directeurs du développement durable au sein de leur direction pour valoriser l'image de leur société auprès des agences de notation ou pour obtenir des aides publiques. Pourtant, le développement durable pose avec acuité la question de la responsabilité de l'entreprise vis-à-vis de la société.

  • Du point de vue de l'économie générale, on s'interrogera sur la nécessité d'une implication de tous les acteurs économiques en général et de l'entreprise en particulier, dans le choix d'un mode de développement respectueux des équilibres environnementaux et sociaux.

L'économie pose les problèmes de l'allocation (l'emploi) des ressources rares et de leur répartition. En économie de marché, l'entreprise (dans sa diversité) est l'agent privilégié (mais non exclusif) de la création et de la répartition des richesses. Les pouvoirs publics ont pour rôle de réguler les marchés lorsque ceux-ci sont imparfaits (les marché oligopolistiques sont source de gaspillage) ou déficients (production d'externalités). Quelles sont alors les relations à l'évidence ambivalentes entre la croissance et le développement économique ? La croissance ne se traduit pas nécessairement par un véritable progrès économique et social. Ainsi, l'entreprise à la recherche de sa pérennité économique ne contribue pas forcément au développement de son environnement économique et social.

Les idées clés

  • La notion d'externalités est au cœur de la réflexion sur le rôle respectif de l'État et du marché puisqu'elles empêchent la réalisation d'une allocation optimale des ressources, d'un optimum parétien. L'intervention de l'État est donc légitimée notamment par la création de marchés spécifiques (marchés de permis négociables) ou la taxation d'activité concernées (principe du pollueur- payeur) puisque les choix effectués notamment par les entreprises ne conduisent pas spontanément à l'intérêt général. Encore faut-il que ces externalités soient évaluables et ne soient pas irréversibles.

 

  • Le développement durable implique que les obligations des entreprises vis-à-vis des pouvoirs publics soient accrues (renforcement des règlementations des activités polluantes, des normes de production et de qualité, des taxes...). Aussi, certains industriels font pression sur les pouvoirs publics afin de limiter les mesures contraignantes. Cependant, par le caractère inéluctable de certaines mesures (réforme inévitable de la règlementation sur les risques industriels en France après la catastrophe de l'usine AZT par exemple), certaines entreprises sont demandeuses d'un cadre règlementaire stable afin de planifier leurs investissement et leur R&D.

 

  • Le développement durable peut être un axe stratégique pour l'entreprise : simple support de communication dans le but d'améliorer l'image de marque de l'entreprise, élément d'optimisation fiscale par le biais d'investissements défiscalisés ou d'obtention de subventions publiques ou composante à part entière de la stratégie commerciale de l'entreprise qui cherche à répondre à de nouvelles exigences du consommateur (exemple du comité "de l'éthique sur l'étiquette") ou encore stratégie de développement sur de nouveaux marchés (les marchés éco-industriels de traitement des déchets, de l'eau, de développement des énergies renouvelables...). C'est également un moyen d'accroître la rentabilité et la compétitivité à moyen terme de l'entreprise par des investissements en économie d'énergie ou de valorisation des déchets.

 

  • La gestion des biens "libres" ou communs que sont l'eau potable ou l'air (respirable) sera un enjeu économique majeur des prochaines années. Ces biens font déjà l'objet de stratégies d'acquisition des groupes internationaux (marché des eaux de source et minérales, celui de la distribution des eaux potables, marché des médicaments...). Leur "privatisation" ne va pas sans heurt, les intérêts des entreprises entrant parfois en conflit avec ceux des pouvoirs publics. En outre, les pays du Sud sont en général les plus dépourvus. D'ores et déjà, la destruction irréversible d'une partie du patrimoine naturel, que la génération présente est censée transmettre aux générations futures, diminue (ou pour le moins modifie) les perspectives de développement des marchés du médicament, de la santé, de la pêche... De même, la multiplication (par trois) des catastrophes naturelles perturbe le marché des assurances.

 

  • La notion de développement durable pose la question du contenu du développement. La profitabilité des entreprises est une condition nécessaire à l'investissement et au développement économique, mais elle n'est pas suffisante. Les investissements doivent être orientées vers une gestion économe des ressources non reproductibles par l'homme. Les fruits de la croissance doivent être répartis et redistribués de sorte que les inégalité soient réduites entre le Nord et le Sud ainsi qu'au sein des États.

 

Proposition de plan

 

1) Le profit maximum, finalité de l'entreprise, et le développement durable : deux exigences apparemment contradictoires...

                    11) La recherche de la compétitivité et de la profitabilité permettent à l'entreprise de soutenir la concurrence accrue, alors que le développement durable est une réponse aux évolutions des exigences sociales.

                    12) Cependant, l'exercice de la compétitivité paraît contrecarrer la recherche d'un développement durable, en particulier dans l'économie financière de marché actuelle

2) Mais qui, sous certaines conditions, peuvent devenir complémentaires et faire de l'entreprise un héraut du développement durable

                    21) Le développement durable peut , sous certaines conditions, favoriser la compétitivité et le succès de l'entreprise.

                   22) Mettre du profit au service de la citoyenneté et du développement durable : une nécessité urgente et un défi à relever pour les entreprises.

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