Antoyne MAUCHRESTIEN (son vrai nom) est né
à Falaise vers 1575. Il meurt lors d'une escarmouche confuse,
au printemps 1621, près de Domfront (Orne). Ce personnage
haut en couleur est le fils d'un apothicaire et sa famille, d'origine
modeste, pense à un destin ecclésiastique, Mais
celui qu'un biographe qualifie de " Cyrano normand "
ne rêve que de coups et de blessures, d'aventures lointaines
et d'amours audacieuses, tout en aspirant à la reconnaissance
sociale et à la renommée. Il est d'abord auteur
dramatique de tragédies dramatiques et fait jouer sa première
pièce en 1596.
En 1601, il publie un recueil de tragédies
dont la plus célèbre, et la seule encore connue,
L'Écossaise, s'inspire de la vie de Marie Stuart. En cette
même année 1601, le bon roi Henri, quatrième
du nom, nomme Barthélémy de Laffemas ministre du
commerce. Initiateur de ce qui deviendra le colbertisme et partisan
d'une politique industrielle active, il développe les manufactures
royales, créant notamment en 1603 celle des Gobelins. Si
la postérité a plus retenu l'action de son rival
Sully, il est une référence de son temps
II publie en 1606 un opuscule intitulé
Du commerce, de la vie du loyal marchand et du bien qu'il faict
au peuple du Royaume. C'est un des rares livres que Montchrestien
a la possibilité d'embarquer dans sa fuite : car, en cette
année 1606, il doit quitter précipitamment le pays
pour avoir tué quelqu'un en duel. Muni du livre de Laffemas,
il s'installe en Angleterre puis aux Provinces-Unies, pays dont
la richesse augmente régulièrement malgré
de faibles ressources naturelles. Fasciné par le dynamisme
des Hollandais, il s'intéresse à ce qui deviendra
grâce à lui " l'économie ". Revenu
en France en 1609, se faisant appeler chevalier de Vasteville,
il fait un riche mariage qui lui donne les moyens de créer
une manufacture d'ustensiles et d'outils à Châtillon-sur-Loire.
Apparemment assagi, notable reconnu et prospère il est
fait baron en 1616. C'est dans ce contexte qu'il envoie en 1615
au jeune Louis XIII un traité d'économie politique
qui doit aider le roi à consolider sa place dans l'histoire
et va en pratique, assurer la sienne. Son contenu est jugé
peu original dés la parution. Montchrestien copie Laffemas.
Tous deux s'opposent à la vision scolastique
qui met au centre de la société le paysan guidé
dans sa vie spirituelle par le prêtre et, dans sa vie matérielle,
par le seigneur. Pour eux les personnages importants sont l'industriel
et le commerçant. En effet, la source de toute richesse
est le travail, mais le travail agricole, qui dépend de
la nature et de ses saisons, est limité dans ses résultats,
et donc moins efficace que celui de l'artisan et de l'ouvrier.
Ces derniers qui ne produisent pas leur nourriture, ont besoin
d'échanger avec les paysans pour vivre de leur travail.
C'est le rôle des commerçants d'organiser ces échanges,
de vendre de quoi se nourrir à l'ouvrier et ses outils
au paysan. Cette réhabilitation du commerçant que
l'Église a du mal à accepter s'accompagne d'une
apologie de l'accumulation de l'or et de l'argent, métaux
précieux qui sont les instruments privilégiés
du commerce. Montchrestien croit qu'il fait, selon l'expression
en usage à son époque, de la " chrématistique
", Montchrestien veut fournir au roi des conseils pour faire
une bonne politique, c'est-à-dire bien gérer l'État.
Comme le but du souverain doit être le bonheur de ses sujets,
et que ce bonheur passe par leur aisance matérielle, son
économie politique est une réflexion sur le moyen
d'accroître la production nationale.
Mais elle ne se limite pas à cela. Montchrestien
conseille au roi une politique étrangère agressive,
des guerres victorieuses pour s'assurer la gloire et l'admiration
de ses sujets. Il défend des thèses colonialistes.
Le livre ne connaît guère de succès, mais
c'est à partir de sa publication que l'expression "
économie politique " s'impose. Certes, ORESME écrivait
déjà au XIV siècle " Économie
est l'art de gouverner pour acquérir richesses " et
Louis Turquet de Mayerme parlait, dès 1590, d'économie
politique. Mais c'est après Montchrestien que l'on prend
l'habitude de désigner la réflexion sur la création
de richesses sous le nom d'économie politique. Dans l'immédiat
après-1848, les économistes, soucieux de ne pas
effrayer les pouvoirs contre-révolutionnaires qui se mettent
en place, laissent tomber le " politique ". Dès
lors, on parlera de science économique. En 1621, Montchrestien
meurt en rebelle. Il a rejoint les maquis protestants hostiles
au roi, sans que l'on connaisse ses mobiles réels. S'il
est peu probable qu'il se soit converti au calvinisme, plusieurs
hypothèses sont émises : soit il fuit la faillite
honteuse de son entreprise, ou une coalition de maris trompés
en colère, ou enfin la justice qui le pourchasse pour s'être
fait faux-monnayeur ! Il partage ses derniers jours entre l'attaque
des riches façon Robin des bois et la rédaction
de poèmes en l'honneur de l'armée. Lui qui fut économiste
tout en voulant être Ronsard meurt des mains d'une famille
destinée à s'acharner contre lui. Le magistrat qui
dirige l'assaut fatal s'appelle Claude TURGOT. C'est un lointain
ancêtre d'Anne-Robert TURGOT, qui s'emploiera à tuer
les idées mercantilistes dont il fut un héraut.
Avec Bodin et Colbert, il est une des figures du mercantilisme
industriel.
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