Devant la gravité d’une crise des liquidités
qui a enrayé les trois rouages de l’activité
économique (Production-Répartition-Consommation),
les gouvernements sont inquiets. Des milliards ont été
débloqués et injectés dans l’économie
(360 milliards d’euros pour l’Europe et 800 milliards
de dollars pour les Etats-Unis) sans que pour autant ne disparaissent
les risques de récession et de déflation. Après
le séisme qui a déjà fortement ébranlé
la sphère financière, sa réplique fragilise
à présent l’économie réelle,
et met en péril les secteurs de l’automobile et du
bâtiment. Le chômage est de nouveau à la hausse,
et les Etats, tous reconvertis à l’interventionnisme,
espèrent la reprise pour 2010.
Mais deux années, et maints plans de relance, suffiront-ils
pour sortir notre économie de ce cycle dépressif
parti de la finance ?
La crise financière était prévisible mais
seule son ampleur était réellement surprenante.
Elle trouve son origine dans cette dérégulation
de grande envergure des marchés financiers à la
fin des années 80, qui a transformé le système
financier international en un ensemble de mécanismes complexes,
porteurs des germes de leur propre effondrement. Face à
la crise, la réaction immédiate du gouvernement
a été la bonne. Elle a permis d’éviter
la faillite du système bancaire et par ricochet, a sauvé
des pans entiers de notre économie. Mais au-delà
de ces soins prodigués dans l’urgence, deux remèdes
s’imposent aujourd’hui, pour sortir de la récession.
Le premier remède consiste en la mise en place d’une
politique monétaire expansionniste dont l’objet serait
d’accroître le volume des liquidités. La Banque
Centrale Européenne pourrait ainsi, sous l’effet
de la chute des prix des matières premières, pratiquer
des taux d’intérêt proches de zéro.
L’efficacité d’une telle politique tiendrait
à la mise en place de nouvelles règles financières
solides, étendues aux marchés dérivés,
contrôlées et sanctionnées par les banques
centrales. Toutefois, devant l’ampleur de cette crise systémique,
le seul levier de la politique monétaire ne saurait suffire.
Aussi, un second remède, basé sur le levier de
la politique budgétaire, est-il souhaitable. Il n’est
pas acceptable que des usines ferment et que des salariés
soient licenciés par milliers dans des secteurs clé
de notre économie. Il incombe donc à l’Etat
de venir au secours des secteurs gravement touchés au moyen
d’une politique de relance de grande ampleur. A ce titre,
un plan de relance évalué à 36 milliards
d’euros sur deux ans, soit treize milliards d’euros
par an, fait bien pâle figure, malgré une orientation
ciblée sur l’investissement et sur les PME. Un tel
plan ne privilégie véritablement que le rouage de
la production et ne devrait produire ses effets que fin 2009.
Dans la conjoncture dégradée qui est la notre, ne
faudrait-il pas alors un second plan de relance, élargi
aux deux autres rouages de l’économie ?
S’il était mis en œuvre, le second plan gagnerait
à repenser le mode de partage de la valeur ajoutée,
aujourd’hui trop défavorable aux salariés.
Un tel partage ne peut en revanche être efficient que si
l’on allège la fiscalité des entreprises,
proportionnellement aux augmentations de salaires qu’elles
accordent. L’augmentation salariale ne fragiliserait alors
en rien la compétitivité des entreprises qui pourraient
ainsi augmenter les salaires sans avoir à supporter le
coût de l’augmentation. Stimulée par une baisse
globale de la fiscalité, la hausse généralisée
des salaires relancerait la consommation via un mécanisme
d’effet multiplicateur. La hausse de la demande profiterait
donc à l’ensemble des acteurs économiques
et le surcroît de consommation concourait ainsi à
une augmentation substantielle des recettes budgétaires
liées à la T.V.A. Les entreprises augmenteraient
leurs marges sans modifier leurs prix du fait des carnets de commandes
enfin remplis et sauveraient ainsi des centaines d’emplois.
Ce schéma vertueux ne sera cependant effectif que si l’Union
Européenne rompt avec la frilosité qui a jusqu’alors
caractérisé sa réaction.
Le plan de relance européen (200 milliards d’euros)
reste insuffisant et l’Union peine à s’affranchir
de toute logique bassement nationale. En 1929, le New Deal n’a
été possible que par la constitution d’un
budget fédéral américain et même si
les Etats européens rechignent aujourd’hui, malgré
la gravité de la crise, à se départir de
leurs prérogatives budgétaires, il leur faudra en
revenir à ce vieil adage « aux grands maux, les grands
remèdes » et comprendre qu’une crise de grande
ampleur implique une relance coordonnée de grande ampleur.
L’économie n’est pas une machine qui n’obéit
qu’à des règles mécaniques. Restaurer
les anticipations optimistes des agents implique un projet capable
de restaurer la confiance en l’avenir en fédérant
l’ensemble des politiques économiques et sociales
à un niveau supranational. Cette ambition fait aujourd’hui
défaut à l’Union européenne qui pourtant,
forte d’une union monétaire solide, pourrait construire
une organisation européenne des marchés financiers
où la finance serait au service de l’économie
réelle et non l’inverse.
G érard Fonouni
ACTUALITES
Dernières vidéos en ligne
PODCASTEZ
!
Portail
numérique de l'éducation et
de l'orientation