Cette analyse est en partie née de l'insatisfaction croissante
ressentie par bien des économistes à l'égard
des anticipations adaptatives. (voir tableau des théories
économiques).
En 1960, John MUTH avance un argument selon lequel la prévision
des agents est "parfaite", sans être forcemment
exacte, dans le sens où elle est faite à partir
des lois de probabilité effectivement suivies par les phénomènes
étudiés. Si erreur il y a, elle ne peut être
systémique car, si elle l'était, les agents rationnels
s'en apercevraient et l'intègreraient dans leurs calculs.
Cette rationalité des agents suppose une connaissance
de l'ensemble des caractéristiques de l'économie
. De plus, étant un cas particulier des prévisions
parfaites, les anticipations rationnelles supposent l'équilibre
permanent et l'autoréalisation de la croyance des agents.
C'est par la représentation préalable de l'économie
par l'agent, sous la forme d'un modèle, que l'on peut comprendre
l'idée d'autoréalisation, puisque le modèle
est à l'origine d'actions qui "engendrent" les
situations qu'il décrit. Ainsi, les croyances des agents,
de type walrassien, sont-elles considérées comme
un paramètre que se donne "a priori" le modélisateur.
Robert LUCAS introduit cette hypothèse des anticipations
rationnelles au début des années soixante-dix ("Expectations
and the neutrality of money", Journal of economic theory,
1972). Les grands courants de pensée économique,
les nouveaux classiques, les monétaristes et quelques keynésiens
ont adopté cette théorie.
On peut néanmoins avancer que "La principale conséquence
de l'introduction de l'hypothèse des anticipations rationnelles
est d'avoir complètement évacué le problème
central de l'économie politique, celui de la coordination
des décisions individuelles : les anticipations rationnelles
ne sont qu'une version modernisée de l'ancienne hypothèse
de prévision parfaite" (B.Guerrien).